Il y a un truc avec moi c’est que j’adore faire la prof. Quand j’étais petite, mon frère et ma sœur me surnommaient même le « Schtroumpf à Lunettes », c’est vous dire si ce trait de mon caractère est discret …
Alors quand mon gastronome et oenophile ami Aldo m’a dit qu’il voulait apprendre à faire les terrines, je n’ai pas laissé passer cette occasion de diffuser ma science et de permettre au monde de profiter de l’étendue de mon immense savoir. Et me voila donc, les mains dans la pintade, à pérorer sur l’équilibre entre le maigre et le gras et l’importance de l’assaisonnement – comme si je savais ça depuis ma naissance alors que j’ai tout pompé le mois dernier dans l’excellent Livre des Terrines et des Pâtés, dont au passage je vous recommande chaleureusement la poétique lecture.
Bref, au départ, elle était aux cèpes cette terrine* – mais je n’ai pas trouvé de cèpes fréquentables ce jour là, et j’ai donc opté pour un mélange chanterelles/lentins bien parfumé.
Ingrédients pour une terrine de un litre environ :
- 150 g de chanterelles
- 150 g de shii-takes frais (si vous n’en trouvez pas vous pouvez les
remplacer par des cèpes ou des champignons de Paris, il n’y a pas à rougir !)
- une pintade
- 100 gr d’escalope de veau
- 200 gr de poitrine de porc fraiche (non fumée non salée)
- un œuf
- deux échalotes
- une demie botte de persil
- un mélange d’épices à votre goût (nous avons choisi le « Rêve de Cochin » de Monsieur Roellinger à base de muscade, coriandre, anis vert et cardamome – mais un mélange « quatre épices » fera aussi l’affaire).
- du paprika doux
- du piment d’espelette
- deux gousses d’ail
- une feuille de laurier
- du sel et du poivre du moulin
Pour la gelée
- Le jus rendu par la terrine
- une bonne louche de bouillon de pintade ou poule
- 2 gr d’agar agar
Nettoyez les champignons, coupez-les en petits morceaux.
Faites les revenir vivement dans un mélange d’huile et de beurre, avec deux gousses d’ail écrasées, sans oublier de les saler. Quand ils ont rendu leur eau et qu’ils commencent à griller, stopper la cuisson et réserver.
Émincez les échalotes et faites les revenir dans une grosse noix de beurre additionnée à mi cuisson d’une cuillère à soupe d’eau chaude : en effet il faut que les échalotes cuisent mais non qu’elles colorent. Réserver, laisser refroidir.
Commencez par lever les filets de la pintade, puis les cuisses. Mettez le foie de côté.
Si vous avez le courage, faites un bouillon avec la carcasse de pintade.
Salez les filets, réservez les au frais.
Désossez les cuisses, et rassemblez-les dans un grand saladier avec le veau coupé en lanière, le foie de la pintade, la poitrine de porc coupée en morceaux, découennée et débarrassée des morceaux de cartilage. Salez, arrosez d’un trait d’armagnac et laissez reposer deux heures au frais (cette étape est facultative mais c’est meilleur).
Passez ensuite au robot couteau ou au blender par à coups, doucement, en remuant bien entre chaque coupe. Il ne faut pas que la viande chauffe ni ne perde sa texture (bien sur si vous avez un hachoir vous êtes le roi du monde et vous savez que faire).
Dès que la farce a acquis une texture souple et homogène, versez-la de nouveau dans le saladier et mélangez là avec un oeuf entier, les échalotes, les champignons, une grosse poignée de persil émincé, le sel et les épices en quantité.
Attention : il est quasiment impossible pour les amateurs que nous sommes de contrôler avec exactitude l’assaisonnement de la terrine une fois qu’elle sera cuite, voici cependant quelques conseils :
- Pensez bien que le résultat une fois cuit sera nettement plus fade que la farce crue, donc ayez la main généreuse
- Pensez que certains épices changent de goût à la cuisson quand vous « imaginerez » votre résultat
- Vous pouvez faire cuire une petite boulette de farce dans de l’eau bouillante pour vous faire une meilleure idée – c’est ce que nous avons fait – cela donne une bonne direction, mais là aussi le résultat final sera tout de même assez différent.
Une fois l’assaisonnement réalisé, laissez la farce reposer au frais.
Pendant ce temps, coupez les filets en deux ou trois morceaux.
Autre étape facultative mais qui donne goût et moelleux : Faites-les revenir au beurre quelques secondes, à peine le temps de les raidir (ils doivent rester crus). Réservez-les. Jetez la graisse et déglacez la poele au fonds de veau jusqu’à ce qu’il vous reste l’équivalent d’une cuillère à soupe. Versez sur les filets et massez un peu pour faire pénétrer.
Montez la terrine en alternant la farce et les filets de pintade (crus ou raidis selon l’option que vous aurez choisie). Les observateurs avisés que vous êtes aurez remarqué sur la photo que nous avons employé de la crépine mais je n’ai pas eu l’impression que cela serve à grand chose, donc finalement je ne vous conseille pas d’en mettre.
Enfournez au bain marie, terrine couverte, dans un four à 150°, pour 50 mn.
Au bout de ce temps enfoncez une aiguille ou un couteau pointu. Il doit ressortir propre et chaud (s’il est froid ou que de la farce crue y adhère un peu, c’est que l’intérieur n’a pas encore assez cuit).
Sortez du four. Versez le liquide qui s’est échappé dans un bol, et laissez refroidir à température ambiante.
Une fois la terrine bien refroidie, elle aura de nouveau « craché un jus : versez-le également dans le bol.
Faites ensuite chauffer le contenu du bol avec une louche de bouillon et l’agar agar. Portez à ébullition et laissez bouillir fortement au moins deux minutes.
Laissez refroidir légèrement puis filtrez, et versez sur la terrine jusqu’à la recouvrir. Placez au frais 24h.
Sortir une heure avant de dégustez, et accompagnez d’un Fleurie ou d’un Morgon bien fruités.
* Cette recette est très librement inspirée de celle trouvée dans le magasine Régal actuellement en vente, j’ai adapté la trame en complétant avec tout ce que j’ai appris dans mon beau livre- et j’ai aussi radicalement diminué le temps de cuisson.
C’est le retour des terrines depuis quelques temps et c’est tellement bon. Magnifique te recette!
Merci ! Oui c’est un peu de boulot mais qu’est-ce que c’est chouette après, je ne connais pas beaucoup de choses plus gratifiantes que manger une terrine maison avec des bons copains…